Chères études
Lorsqu'Amma est en tournée dans les pays occidentaux, les divers stands présentent ses oeuvres humanitaires. Parmi les étals, se trouvent les écoles et les universités Amrita. Je trouvais tellement généreux de sa part de collecter de l'argent pour construire des établissements où les personnes défavorisées se voient offrir une chance d'avoir un avenir meilleur.
Par contre lorsqu'Amma est en tournée en Inde, les journaux locaux sont remplis de publicités vantant les mérites de ses établissements éducatifs.
La première fois que j'ai vu l'une de ces publicités lors du tour du sud, ça m'a interpellée. La misère est telle dans ce pays que les personnes qui n'ont pas beaucoup de moyens se précipitent certainement pour bénéficier des miettes qu'on leur donne, alors pourquoi gaspiller de l'argent à faire de la publicité?
Sur le chemin du retour à la fin du tour, nous avons fait une halte dans l'université de Coimbatore. Dès que je suis entrée dans le bâtiment équipé d'une piscine olympique en plein air avec vue pittoresque sur une montagne, mon sang s'est figé. Cette université est luxueuse par rapport à celles où j'ai fait mes études à Montpellier. Je me suis dit que si j'avais vécu en Inde, j'aurais simulé la pauvreté totale pour réussir à me faire admettre dans un établissement aussi haut de gamme dédié à l'humanitaire.
Voici à titre d'exemple une vidéo promotionnelle datant de 2014, qui détaille l'excellence des universités Amrita. La voix off annonce l'existence de 23 centres de recherche scientifique, qui ont déposé en tout 51 brevets, ce qui a nécessité 2 milliards de roupies d'investissement en crédit de recherche, c'est à dire environ 27 millions d'euros.
Est-ce que vous sentez un petit quelque chose d'humanitaire dans cette vidéo? Moi je n'en perçois pas une seule goutte. Au contraire, ça sent la compétitivité, l'industrialisation et la mondialisation. Et si on cherchait plus d'informations au sujet de ces universités?
Les boursiers
L'organisation insiste lourdement sur les étudiants boursiers. Tous les ans en septembre, certains d'entre eux sont fièrement exhibés en public, dans le cadre d'un spectacle lors de l'anniversaire d'Amma. Il paraît qu'il y a 32 000 boursiers. 32 000 chaque année ou bien 32 000 en tout depuis la création des établissements? Je me pose la question parce que d'après la page wikipedia officielle, les universités accueillent un total de 18 000 étudiants. 32 000 boursiers parmi 18 000 étudiants? Il y a un truc pas clair dans les chiffres.
Qu'importe, voyons le témoignage d'un de ces boursiers. Le 03 Novembre 2011 un étudiant se plaint en ces termes sur un forum en ligne :
"Je représente les étudiants MTech de l'université Amrita Vishwa Vidyapeetham University à Coimbatore. Nous avons été admis à l'institut avec des notes GATE valides. Les étudiants avec des notes GATE valides sont éligibles pour percevoir une bourse du Ministère des Ressources Humaines durant leur période académique. Même après avoir terminé une année académique, nous n'avons toujours reçu aucune somme de la part du ministère; Les autorités de l'institut disent qu'elles ont fait tout ce qu'il fallait de leur côté. Nous aimerions avoir des clarifications."
Quelle bonne surprise! Alors comme ça les boursiers qui font tant la fierté d'Amma sont en réalité boursiers du gouvernement indien? Elle ne débourse pas un centime pour eux? Au contraire, le ministère lui verse les frais de scolarité des boursiers? En principe, une bourse permet de payer les frais de scolarité et de financer la vie quotidienne. Après un an d'étude, les étudiants n'ont toujours rien reçu. Est-ce le gouvernement ou l'université qui traîne pour faire les versements?
En juin 2011 une autre plainte fait état d'un problème similaire de retard dans le versement des bourses :
"J'ai un score de 489. J'ai maintenant terminé ma première année de MTech à l'université Amrita à Ettimadai Coimbatore. 15 étudiants de ma promotion sont éligibles pour une bourse GATE. Mais nous n'avons toujours pas reçu de bourse.
L'an dernier 2 de nos seniors avaient reçu leur bourse à cette période. Les étudiants de plusieurs autres instituts ont déjà reçu la bourse. Pourquoi un tel retard? Est-ce que les autorités concernées pourraient s'en occuper?"
En juillet 2012, une plainte un peu poignante est également postée sur internet :
"Je suis Thenarasu M étudiant en MTech (promo 2011-2013) à l'université Amrita dans le Tamil Nadu. Monsieur, j'ai été admis dans cet institut par le GATE. Je n'ai toujours pas reçu ma bourse de l'AICTE de 2011 à ce jour. Monsieur j'ai passé énormément de coup de fil à l'AICTE mais je n'ai toujours pas de réponse. Je suis dans une très mauvaise situation maintenant, il m'est difficile de gérer mes dépenses et de rembourser le prêt que j'ai contracté pour payer initialement les frais de scolarité, alors je vous prie de m'informer de ce que je dois faire pour recevoir ma bourse à temps dans le futur. Je vous remercie pour votre précieuse réponse."
Apparemment l'AICTE est la branche ministérielle qui s'occupe des bourses et les retards sont fréquents. Les étudiants boursiers doivent emprunter de l'argent pour payer les frais de scolarité en avance. Avec tous les dons qu'elle reçoit, Amma ne peut pas dispenser les boursiers du versement des frais de scolarité? Elle est sûre qu'elle sera rémunérée puisque l'argent provient du gouvernement, c'est juste une question de temps.
Faire un prêt signifie rembourser des intérêts donc au final les études coûtent plus cher pour les boursiers que pour les étudiants assez fortunés pour payer eux même les frais de scolarité. Ce dernier témoignage m'a écoeurée car j'ai été boursière. Le peu de problèmes administratifs que j'ai eu m'a perturbée alors j'imagine sans peine la détresse de cet étudiant.
Corruption
Avec des frais de scolarité aussi élevés est-ce que les établissements sont de bonne qualité? Difficile de savoir. Certains disent que oui, d'autres parlent de piètres services.
Une chose cependant est récurrente, ce sont les pots de vin. Pour s'inscrire dans un établissement en Inde, il faut passer des concours ultra compétitifs ou glisser des liasses de billets de banque sous la table. Même les étudiants admis sont régulièrement invités à faire un "don" obligatoire, sous peine de ne pas être inscrits. Ce père de famille par exemple a carrément porté plainte à la police contre l'Amrita Vidyalayam de Juinagar, après avoir tenté d'inscrire son fils à l'école d'infirmerie :
"Tout d'abord, les responsables de l'école m'ont annoncé sans ménagement que je ne pourrais pas bénéficier d'une inscription parce qu'il n'y avait plus de place et plus tard ils m'ont dit que je devais faire un don pour le développement du bâtiment de l'école. J'ai refusé de faire un don alors les autorités ont répondu que je n'aurais pas mon inscription et comme il n'y avait pas d'autre solution j'ai payé 15 000 roupies ...
J'ai été choqué de voir que le reçu qu'ils m'ont donné pour le don que j'ai fait, provenait du Mata Amritanandamayi Math. Je leur ai demandé comment ils pouvaient me donner un reçu du Math alors que j'avais fait un don pour le bâtiment scolaire. Ils m'ont dit de ne pas poser de question et de sortir de l'école ...
La principale précédente qui s'était élevée contre ces pratiques a été suspendue et maintenant ils ont nommé comme directrice de l'école une swamini qui n'est même pas diplômée d'un doctorat et les péons assis à l'entrée de l'école n'autorisent personne à la voir. Tous les parents ont les mêmes griefs envers l'école mais aucun n'est prêt à se battre."
Pas triste. En tout cas cet homme obligé de payer 200€, accuse l'ashram de capter les "dons" soutirés de force auprès des parents d'élèves. D'autres témoignages sur internet évoquent ces dons obligatoires réclamés par les institutions Amrita. Qu'est-il advenu de la principale qui protestait contre la corruption? Certains dévots quittent l'organisation lorsque dans le cadre de leur bénévolat, ils se rendent compte que les activités caritatives sont mensongères.
Rentabilité
La plainte suivante, également postée en ligne par un parent d'élève, nous apprend des choses encore plus surprenantes en février 2012 :
"Voici l'époque de l'année où les hauts responsables (je les appelle les requins) venant de soi-disant 'universités de pointe' en Inde, visitent le Golfe afin d'attirer les étudiants dans leurs institutions et j'écris ceci afin d'avertir les parents avant qu'ils lâchent d'énormes sommes d'inscription ...
Quatre ans auparavant, le directeur des relations internationales de l'université Amrita à Ettimadi Coimbatore en Inde, qui a des campus dans le Kerala et le Karnataka, a visité Muscat pour pister de l'étudiant. Je l'ai rencontré dans une école indienne à Dubai et j'ai payé les 700 000 roupies qu'il m'a demandé pour l'admission de mon fils dans la branche informatique de l'institut ...
Premièrement cette 'grande' université a interrompu ses cours d'informatique. Super le choix du campus.
Deuxièmement, j'ai constaté que les standards d'enseignement sont des sous-standards, c'est le moins qu'on puisse dire. La plupart des professeurs sont fraîchement diplômés sans la moindre expéricence et ils ne parlent même pas un anglais correct (faites une croix sur le bon anglais). La moitié du temps ils font leur classe en Tamoul. Si un étudiant ose demander des clarifications, il est insulté devant toute la classe.
Troisièmement, l'atmosphère du campus est oppressante. Le corps enseignant et le personnel administratif se conduisent mal envers les étudiants à la moindre occasion. Ils insultent et maltraitent les étudiants ouvertement, les démoralisant totalement. En fait les étudiants ont peur du personnel et ne s'expriment pas ouvertement.
Quatrièmement, les conditions d'hebergement sont déplorables, surtout en ce qui concerne la nourriture servie aux internes. La plupart des étudiants sont obligés de manger dans les restaurants du campus, payant ainsi un prix exhorbitant. Les parents se retouvent à devoir payer les frais de cantine plus les frais de restaurant!
Après ma visite à l'université, J'ai découvert que c'est une arnaque bien organisée, dans le sens ou l'université fait des bénéfices énormes en louant l'espace aux restaurants. J'ai dénombré quatre restaurants tentaculaires, bondés à toute heure et deux autres étaient en construction. Donc la raison pour laquelle la nourriture est mauvaise à la cantine est évidente."
Résumons la situation. Amma collecte des dons aux 4 coins du monde pour soi-disant développer l'Inde. Et puis elle envoie des swamis commerciaux dans les riches pays du Golfe pour recruter des étudiants? Pour les cours d'informatique il faut débourser 9600€, coquette somme!
Cette histoire de cantine m'intrigue. Ce que décrit cette personne est similaire à ce qui se passe à Amritapuri, l'ashram d'Amma. La nourriture qui est comprise dans les frais d'hébergement est strictement la même tous les jours et ne contient quasiment pas de protéine. C'est du riz noyé dans son eau de cuisson, accompagné d'une sauce aux légumes. C'est fade et pas nourrissant donc on passe son temps à acheter d'autres choses à droite à gauche. Il y a un seul restaurant tenu par des personnes externes. Tous les autres stands qui vendent de la nourriture appartiennent à l'ashram. Donc en plus des frais d'hébergement, on est obligé de payer Amma pour manger décemment. Maline la déesse!
Les amendes
Les règles sont très strictes dans les établissements Amrita, surtout au lycée et au collège. Ce point est soulevé par beaucoup d'étudiants sur les forums. Il faut porter un uniforme, les filles doivent avoir les cheveux longs et attachés, les garçons doivent avoir les cheveux courts... Toute infraction est punie d'une amende. Le plus surprenant, c'est qu'il faut obligatoirement avoir de bonnes notes, sinon? Sinon on se prend une amende! Chaque examen raté coûte 6 000 roupies à l'étudiant en difficulté, c'est à dire environ 80€.
Cette gestion de mauvais goût a coûté la vie d'un lycéen en 2012. Il était en grande difficulté dans son cursus d'électronique et d'instrumentation. Tout ce qu'il a reçu comme assistance pédagogique, c'est du harcèlement de la part de l'administration scolaire et des amendes en rafale. Il a fini par se pendre dans sa chambre. Le pire c'est qu'il respirait encore lorsque ses camarades l'ont trouvé, mais les surveillants de l'internat ont empêché quiconque d'intervenir en prétextant que seul une autorité médico-légale pouvait s'approcher du pendu.
L'annonce du décès a évidemment mis les étudiants en colère. Une mini-grève s'est spontanément mise en place, attirant l'attention des média. On apprend ainsi que même fêter son anniversaire dans l'internat est puni de 25 000 roupies d'amende, ce qui fait 300€. Les juteuses punitions ne dupent personne, comme le dit si bien un élève : "Les autorités du lycée sont plus intéressées à nous faire échouer pour se faire de l'argent"
Morale politico-religieuse
En plus des règles, une morale très stricte est appliquée dans les établissements Amrita. Notamment, les contacts entre fille et garçons sont interdits. On voit bien dans la vidéo que les classes sont séparées en deux, un côté fille, un côté garçon, alors qu'on est dans une université. La fête nationale de l'Inde est célébrée tous les ans, de même que l'anniversaire d'Amma pendant lequel les élèves ont droit à des vacances spéciales. Certains élèves, plus probablement des collégiens et de lycéens, affirment même qu'ils sont obligés d'aller chanter les bhajans et de passer au darshan de temps en temps au risque de se faire sacquer par le personnel enseignant.
Sur cette page d'un forum on retrouve un condensé de tout cela. Plusieurs étudiants livrent leurs expériences, c'est instructif. Petit extrait :
"Vous n'avez aucune liberté hormi celle de faire ce que l'institut vous ordonne. La première année est un genre de prison mais après les restrictions sont allégées. Mais vous n'avez jamais le droit de quitter le campus et vous avez besoin d'un pass spécial pour franchir les portes, ils ne sont délivrés que deux fois par mois, le weekend ...
Enfin, la religion est diffusée dans CHAQUE PUTAIN DE TRUC QU'ILS FONT. On ne peut pas sous-estimer ce point. Nous avons eu des spectacles de danse annulés quelques heures avant la représentation parce qu'ils étaient "trop suggestifs", alors qu'on avait eu les approbations nécessaires. Ils enseignent "l'éducation culturelle" qui consiste en un cours d'une heure par semaine sur le fait que l'Inde est le putain de plus grand pays du monde à cause de son passé glorieux et autres élucubrations idiotes. Il y a des cours de yoga le matin pour les étudiants de première année, ils sont obligés d'y participer. Ils tartinent constamment de la poésie au sujet de la grandeur "d'AMMA" et insistent sur le fait que le monde entier gravite autour de son éminence."
Face à l'envahissante sollicitation religieuse et politique, les étudiants peuvent user de leur faculté de jugement pour décider de ce qu'ils veulent croire ou ignorer. Qu'en est-il des plus petits? Amma possède aussi des écoles primaires, en plus des collèges, lycées et universités. D'après la communication officielle, il y a 49 écoles primaires et secondaires Amrita en Inde. Leur orientation est claire : "Les écoles sont basées sur la doctrine d'Amma, ce qui permet aux enfants d'évoluer naturellement et spontanément lors de ces années décisives".
Lorsqu'on matraque des tout-petits avec la grandeur et l'universalité d'Amma, est-ce qu'on peut commencer à parler de lavage de cerveau? En grandissant, il y a de fortes chances pour qu'ils continuent leurs études exclusivement dans ses établissements et développent un très fort attachement émotionnel envers elle. C'est bien pratique pour étendre l'influence de l'organisation dans la société, car une fois insérés dans la vie active, ces ex-étudiants doivent lui ouvrir en grand toutes les portes de l'industrie, de la politique, du commerce, de la finance, des media...
144 000 !
Lorsque les internautes discutent sur les forums en ligne, ils évoquent souvent les tarifs des établissements Amrita. Ils sont tous unanimes pour déclarer que c'est très cher. N'oublions pas qu'il s'agit d'écoles et d'universités privées. Lorsqu'on cherche "Amrita fees" sur internet, on se rend vite compte que les frais d'inscription se chiffrent toujours en milliers d'euros.
Ce sont les études de médecine qui battent tous les records. Pour faire des études de médecine dans l'université d'Amma, les étudiants indiens originaires de l'étranger doivent débourser 144 000 dollars de frais de scolarité! Mon convertisseur m'informe que cela fait 132 000€ pour 4 ans d'étude seulement. Mais comme Amma est l'incarnation de l'amour et de la compassion, cette somme est payable en 3 fois, le premier versement étant de 75 000$ (environ 69 000€). Le document original indiquant les frais de scolarité est accessible de 2 façons :
à consulter en ligne : http://spotidoc.com/doc/344325/fee-structure
à télécharger sur le site internet de l'université : https://www.amrita.edu/sites/default/files/tuition-fee-nri.pdf
Le fameux "144 000" figure en haut de la seconde page, sur la ligne intitulée "MBBS". Il y a 100 étudiants admis chaque année en médecine. Cela fait potentiellement 13 millions d'euros pour l'organisation. Les frais de scolarité des autres filières ne sont pas tristes non plus. En bas de page, le document précise que la cantine et l'internat ne sont pas inclus dans les montants indiqués, l'étudiant doit les régler séparément lors de son admission.
Petit rappel pour bien comprendre ce qu'il y a de choquant dans cette histoire de frais de scolarité avec 3 zéros derrière :
les écoles et universités ont été construites grâce aux dons destinés aux oeuvres humanitaires
l'hôpital AIMS qui abrite les cours de médécine a été aussi construit grâce aux dons caritatifs
il y a des dévots bénévoles qui travaillent gratuitement dans ces établissements
Qu'on ne me dise pas que ces frais d'inscription se justifient par le fait que cela coûte cher d'équiper un hôpital. La plupart du matériel de pointe a été donné gratuitement à AIMS par les dévots américains, via leur association dédiée Healthcare Charities Inc (HCI) également nommée "The AIMS Project". Le site internet de l'ashram de San Ramon en Californie, mentionne quelques uns de ces dons d'équipement : "bandages, lits, civières pour ambulance, accélérateurs linéaires, IRMs, scanner TEP/CT, caméras gamma, laboratoire de cathétérisme". Le site internet de l'hôpital AIMS invite même le public à faire des dons à HCI. AIMS précise que HCI a expédié à l'hôpital 60 containers par voie maritime et 25 par fret aérien. Sans oublier évidemment une photo d'enfant souriant en avant plan, parce que c'est plus facile d'ouvrir le porte-feuille lorsqu'on est ému.
Si c'est tellement horrible et tellement cher alors pourquoi les gens continuent à s'inscrire dans les établissements éducatifs du tentaculaire réseau Amrita? La raison est simple. La vie en Inde est axée sur la compétition et la grandeur. Amma est très célèbre en Inde donc faire ses études dans ses établissements apporte un certain prestige. De plus, grâce au darshan elle a établi des contacts et des partenariats avec énormément d'universités et d'entreprises, surtout à l'international. Donc faire ses études dans une université Amrita c'est la garantie de trouver un emploi à la fin de son cursus. Il n'y a rien d'humanitaire dans tout cela. Rien d'humanitaire dans la démarche d'Amma. Rien d'humanitaire non plus dans la démarche des étudiants. Tout cela n'est que pur commerce.
Lors du dernier programme auquel j'ai participé à Pontoise, un message était diffusé en boucle jour et nuit dans les haut-parleurs. Il disait à peu près ceci : "les universités Amrita cherchent des partenariats alors si vous travaillez dans une université, merci de nous contacter". Et ça marche! La preuve sur cette page qui présente la liste des universités et écoles du monde entier qui ont établi des partenariats avec Amrita. Côté commercial, ça marche bien aussi. Voici par exemple les partenariats en biotechnologie et les partenariats Wifi et technologies sans fil. Chaque filière éducative a ses partenaires industriels, cela permet de placer facilement les stagiaires et éventuellement transformer le stage en emploi.
Grâce à toutes ces informations, on comprend mieux pourquoi en Inde, Amma a une réputation de "money craving" c'est à dire une assoiffée d'argent. Dans le monde actuel, il devient de plus en plus difficile de rester compétitif. Avec Amma, c'est différent. Elle titille la fibre émotionnelle. Elle caresse là où ça fait mal en disant : "je t'aime mon enfant". Subjugués, les gens donnent leur argent, donnent du matériel, signent des partenariats, travaillent gratuitement, l'invitent à s'exprimer sur des tribunes internationales, lui décernent des récompenses et des diplômes universitaires, tournent des films sur elle, chantent ses louanges dans tous les média... L'organisation exhibe un vernis humanitaire pour pouvoir librement étendre son empire, grâce à la gratuité des opportunités financières, industrielles, politiques, scientifiques et médiatiques.
Ce que je vais dire va paraître dur mais c'est ce que je ressens, je suis bloggeuse, pas journaliste. Amma me fait penser à une prostituée itinérante. Elle débarque dans une ville, elle sourit, elle embrasse, elle étreint, elle câline, elle cajole, elle fait rêver, elle provoque l'euphorie, elle déclenche l'extase. Puis elle ramasse l'argent et se dirige vers la ville suivante pour refaire la même chose.
Cela montre l'état de frustration de nos sociétés. Un simple câlin accompagné de propagande mielleuse suffit pour que les gens se laissent mener par le bout du nez avec le sourire, quels que soit leur niveau d'éducation, leur âge, leur milieu culturel, leur richesse et leur position sociale.