Parents d'élèves emprisonnés
Un événement un peu écoeurant s'est déroulé l'été dernier. Mais avant d'arriver au point d'orgue de l'anecdote, faisons un petit retour en arrière pour mieux comprendre.
Depuis 2013 (au moins) les parents d'élèves sont en colère envers les établissements AmritaVidyalayam qui assurent la scolarisation des enfants du primaire et du secondaire. Et pour cause. L'administration prend plaisir à augmenter les frais de scolarités sans préavis. Les élèves qui ne payent pas le surplus surprise sont privés de matériel pédagogique, ils se font sacquer aux examens. En plus ils risquent de se faire expuls... pardon... de recevoir un avis de transfert, ce qui les oblige à chercher d'urgence un autre établissement.
Les parents se sont plaints auprès du gouvernement du Kerala. Ils ont été invités par les autorités officielles à payer le surplus sans broncher, car comme tout le monde le sait, les politiciens sont les grands amis d'Amma. Les parents ont également lancé une pétition. Et alors? Qui s'en soucie?
La tension a ainsi augmenté jusqu'en 2016. C'est fort quand même. Un simple SMS est envoyé aux parents pour les informer que leur budget éducation va exploser. Le résultat est dramatique pour ceux qui ne peuvent pas faire face : "De nos jours, même les pauvres envoient leurs enfants dans les écoles privées. L'administration en profite pour dépouiller les parents. Incapables de supporter la charge financière, beaucoup de pauvres sont obligés d'arrêter leur études en plein milieu".
Srikant dont les enfants étudient à l'Amrita Vidyalaya de Mahendra Hills témoigne : "Lorsque nous nous sommes plaints auprès des autorités officielles, ils ont répondu sans aucune honte que l'administration de l'école est trop puissante et qu'ils ne peuvent prendre aucune mesure contre eux"
Apparement les indiens sont obligés d'étudier dans le privé car le service publique est lamentable. Ils sont donc pris à la gorge par l'administration des établissements scolaires. Mais nous ne parlons pas là de n'importe quelle école. Il s'agit des écoles de Mata Amritanandamayi, celle qui vient quémander des sous en France, soi-disant pour que les pauvres puisse accéder à une éducation de qualité.
La tension a fini par mener à l'explosion. Le 17 juin 2016, après une ènième pétition, après avoir protesté une année entière, des dizaines de parents d'élèves ont organisé une manifestation devant l'AmritaVidyalayam de Tarnaka. Les manisfestants protestaient contre les frais de scolarités augmentés illégalement mais aussi contre le "transfert-expulsion" de 27 élèves dont les parents ne pouvaient pas payer les surplus. Des membres du Syndicat Démocratique des Etudiants du Peuple ont brisés les fenêtres d'un bus scolaire. Des membres du Comité d'Action pour la Régulation des Frais de Scolarité (JAC-SFR) sont venus apporter leur soutien aux parents en détresse.
L'issue du conflit est illustrée dans les vidéos ci-dessous. La police embarque les parents d'élèves. Pour que les enfants soient réintégrés dans les établissements, les parents doivent signer un accord par lequel ils s'engagent à ne plus jamais contester les décisions de l'administration scolaire.
Il suffit de chercher "amrita vidyalayam fees hike" sur internet pour trouver des dizaines de vidéos sur ces polémiques années après années. Même si on ne parle pas la langue, on voit le logo de l'ashram d'Amma sur les murs des établissements, les parents mécontents qui brandissent des documents ou la police qui intervient.
Résumons. Les riches parents qui inscrivent leurs enfants dans les écoles d'Amma peuvent aisément encaisser la hausse des frais. Par contre les parents les plus pauvres ont le choix :
déscolariser leurs enfants en silence
faire un tour au poste de police s'ils font trop de bruit
Je suis écoeurée. Je suis écoeurée lorsque je pense à tout ces dévots qui, de leur chevelure balayent respectueusement les pieds d'Amma, voyant en elle la sauveuse de l'humanité. Je suis ecoeurée lorsque je pense à ces parents et ces enfants indiens dont la vie est brisée par des requins cupides drapés de saintes robes, dont la bouche déborde de sages paroles mielleuses, dont les mains sont gantées de fer barbelé. Je suis écoeurée lorsque je pense à tous ces occidentaux, qui vont glisser pleins d'euros et de dollars dans les boîtes à dons, en pensant naivement qu'ils font un geste pour les plus démunis. Je suis écoeurée.